Paris, hiver 1885. A l’hôpital de la Pitié Salpêtrière,
le professeur Charcot étudie une maladie mystérieuse : l’hystérie.
Augustine, 19 ans, devient son cobaye favori, la vedette de ses démonstrations d’hypnose.
D’objet d’étude, elle deviendra peu à peu objet de désir.
Avec : Vincent Lindon, Soko
Fiche complèteAugustine
Réalisateur : Alice Winocour
Sortie en salle : 07-11-2012
Avec :
Vincent Lindon, Soko
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Bande annonce
- 102 min
- France
- 2012
- 1.85
- SRD/5.1
- Visa n°119.412
Synopsis
Paris, hiver 1885. A l’hôpital de la Pitié Salpêtrière,
le professeur Charcot étudie une maladie mystérieuse : l’hystérie.
Augustine, 19 ans, devient son cobaye favori, la vedette de ses démonstrations d’hypnose.
D’objet d’étude, elle deviendra peu à peu objet de désir.
Critiques presse
Soko est la lumière du film, et Lindon étincelle. « Augustine » émeut et séduit : Télérama
Une tension érotique électrisée par Soko, animale, explosive, et Lindon, tout d’émotivité rentrée : Le Monde
Porté par deux acteurs époustouflants, un film spectaculaire et hypnotisant. : Le Nouvel Observateur
Un premier film sidérant. Inoubliable. : Grazia
A la fois gothique et moderne. Magistral. : L'Express
Sauvage, sensuelle, exceptionelle Soko : Marianne
Crédits du film : © 2012 DHARAMSALA – ARP – FRANCE 3 CINEMA – DARIUS FILMS
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Fiche artistique
Le professeur Charcot Vincent Lindon
Augustine Soko
Constance Charcot Chiara Mastroianni
Bourneville Olivier Rabourdin
Rosalie Roxane Duran
Infirmière principale Lise Lamétrie
Blanche Sophie Cattani
Verdan Grégoire Colin
Pierre Ange Ruzé
Fiche techniqueRéalisatrice Alice Winocour
Scénariste Alice Winocour
Produit par Isabelle Madelaine
Image George Lechaptois
Montage Julien Lacheray
Son Jean-Luc Audy
Costumes Pascaline Chavanne
Décors Arnaud De Moléron
Maquillage Michelle Constantinides
Coiffure Milou Sanner
Une production DHARAMSALA
Une coproduction ARP
Avec la participation de Canal +
Avec la participation du CNC
Avec le soutien de La Région Ile-de-France
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Alice
WinocourQu’est-ce qui est à l’origine de votre désir de cinéma ?Je crois que j’ai toujours voulu faire du cinéma sans jamais oser me l’avouer. J’ai fait des études de droit pour devenir avocate et puis un jour, presque sans réfléchir, je me suis inscrite pour passer le concours de La fémis et j’ai été reçue. Depuis que je suis petite j’ai toujours écrit et j’ai intégré le département scénario. J’avais une vision anglo-saxonne de la profession de scénariste, qui ne correspondait pas à la réalité française. Je croyais qu’il s’agissait d’inventer une histoire dans laquelle on apportait un univers, mais j’ai progressivement réalisé que le scénariste avait souvent pour vocation d’aider le réalisateur à accoucher d’un projet dont il était porteur. Du coup, lorsque j’ai rencontré celles qui sont depuis mes productrices, et qui les premières m’ont proposé de réaliser un court-métrage, je me suis lancée.Votre premier court a été sélectionné en compétition à Cannes…“Kitchen” est un court dont je me sens loin aujourd’hui, mais c’est comme une photo de celle que j’étais en 2005. J’ai beaucoup appris en le réalisant. J’ai compris qu’il y avait des limites au contrôle, et qu’il fallait savoir attraper ce qui se passe sur le plateau, au lieu de s’enfermer dans ce qu’on a prévu.Comment avez-vous découvert l’histoire d’Augustine ?En découvrant les travaux de Charcot, j’ai été immédiatement fascinée. A l’hôpital de la Salpêtrière, dans cette Cité des femmes, des milliers de malades étaient soumises à l’autorité de quelques médecins. Des femmes quasi nues, abandonnées aux regards d’hommes en costumes trois pièces…Augustine, en tant qu’égérie de Charcot, était la star de ses études, la plus photographiée, la plus observée, jusqu’au jour où elle s’est enfuie de la Salpêtrière déguisée en homme. J’ai beaucoup lu sur les examens qu’on lui faisait subir, qui étaient tous très violents et j’ai commencé à m’interroger sur le hors-champ de cette situation.Que se passait-il entre les examens ? Quelles relations pouvaient exister entre Charcot et sa malade vedette ? Tout cela a déclenché mon imaginaire.Pourquoi cette maladie trouble-t-elle autant l’ordre établi ?L’hystérie est une révolte. Les malades de Charcot étaient des femmes de condition sociale très basse, des bonnes le plus souvent sans éducation, soumises à des conditions de vie épouvantables. Elles étaient sans droits, généralement violées. L’hystérie est une réponse à cette violence sous forme de rébellion. C’était comme la première manifestation féministe. Elles exprimaient leur détresse et leurs revendications avec leur corps. Et même si l’hystérie a évolué avec la société, cette révolte me semble toujours d’actualité.L’hystérie est aussi une façon pour ces femmes de prendre le pouvoir ?Lacan a écrit à ce sujet : “L’hystérique est une esclave qui cherche un maître sur qui régner.”. Les femmes souffrant d’hystérie font de leur corps le théâtre de leurs souffrances et de leurs désirs. Ce qu’elles recherchent, c’est un spectateur à fasciner.Vous avez choisi de réaliser un film résolument anti-naturaliste…Je voulais aller dans une direction fantastique pour fuir le naturalisme. L’hystérie, en soi, est tout sauf naturelle. Le corps se met à faire des choses qu’il ne peut pas faire normalement. Le corps ment… De toute façon, par goût, j’aime le cinéma non naturaliste : celui de Lynch, de Cronenberg, celui qui met en scène un monde un peu fantasmé.Quels ont été vos partis pris pour filmer les crises d’Augustine ?C’était la grande question, comment mettre en scène un mensonge ? J’ai filmé les crises d’Augustine comme des crises de possession… J’ai regardé tellement de films d’exorcisme qu’après, la nuit, même les vibrations de mon portable me faisaient peur… Augustine est comme une possédée : elle est victime de son propre corps, qui lui échappe. Donc, au lieu de demander à Soko de mimer une crise, il fallait la lui faire subir. Au tournage, ses membres sont tirés par des cordes, qui la malmènent en tous sens, elle ne peut rien contrôler. Son corps est devenu un monstre qui prend le dessus.Vous montrez Charcot comme une star…Charcot était vraiment une star de la médecine. L’Empereur du Brésil, la femme du Tsar de Russie comptaient parmi ses patients. Et c’était un grand médecin, un précurseur, le fondateur de la neurologie moderne. Les malades elles-mêmes étaient en admiration devant lui. J’ai voulu filmer, non pas son apogée, mais sa chute. L’histoire du film est celle d’un complet retournement du rapport de force entre Charcot et Augustine, le médecin face à sa malade, l’homme mûr face à la très jeune fille, le grand bourgeois face à une fille du peuple. Charcot découvre qu’il a un corps, et perd le contrôle. Augustine découvre qu’elle a une tête, et prend le pouvoir sur lui.Comment avez-vous choisi votre Augustine ?Au départ, je voulais une jeune femme que personne n’avait jamais regardé ni filmé. Une fille dotée d’une grande force intérieure, qui soit encore naïve, mais pas victime. Soko est connue, elle vit à Los Angeles, elle fait de la musique, donc je ne voulais pas du tout la rencontrer ! Elle est tout de même venue aux essais, où je faisais jouer une crise d’hystérie. Soko a fait preuve d’une puissance incroyable. Elle a une volonté farouche, avec en même temps un côté très innocent, presque candide. Il y a quelque chose de brut, de révolté en elle. Elle est très contemporaine, elle apporte naturellement une modernité au personnage. En même temps, son corps convient tout à fait au dix-neuvième siècle : elle a une taille très fine et de vraies hanches. Elle rentrait parfaitement dans les costumes d’époque qu’on a trouvés à Londres sans qu’on ait besoin d’y apporter des retouches. Et son visage, c’est fou à quel point elle ressemble à la vraie Augustine.Comment avez-vous filmé Vincent Lindon ?Vincent Lindon est un acteur très physique, avec en lui une vraie violence intérieure. J’ai contrarié son côté physique en l’emprisonnant dans le carcan du costume... C’était nouveau pour lui de se confronterà la violence d’une sexualité réprimée. Vincent a toujours été du côté du film, il avait foi dans ce que le film racontait. Il avait une confiance dans le scénario qui m’inquiétait parfois, j’avais peur qu’il ne me laisse rien bouger au tournage. Mais très vite, il a vu qu’il donnait des choses qui lui échappaient et cela l’a mis en confiance. Je le remercie pour cette confiance. On se comprenait, mais cela ne passait pas par la parole. En fait je crois qu’on se ressemble beaucoup, même si nous sommes beaucoup dans le contrôle, c’est toujours notre inconscient qui prend le dessus.Comment avez-vous choisi vos figurantes ?Ce sont principalement de vraies malades, tout juste sorties de l’hôpital, et certaines encore sous traitement. Mais je les ai toutes considérées comme des actrices, vis à vis desquelles j’avais des exigences. Je crois qu’elles ont été heureuses de participer au tournage, de porter des costumes, de créer la communauté du film, d’avoir le sentiment d’appartenir à une famille. C’était émouvant de se dire au revoir. Les témoignages face caméra sont de vraies histoires, racontées en costumes d’époque, par celles qui les vivent aujourd’hui.Comment avez-vous vécu le tournage ?Sur le plateau, je voulais casser ce qui avait été mis en place, créer le désordre, faire entrer la vie. Le chaos me rassurait, car tout restait ouvert et m’éloignait de la reconstitution historique… Le scénario est une matière morte, on ne peut pas se contenter de le filmer. Pour les seconds rôles, il y a eu un très grand travail de casting. J’ai choisi chaque visage pour qu’on puisse les filmer comme des tableaux, sans que rien n’ait l’air empesé ou daté.Comment décririez-vous Constance, l’épouse de Charcot ?Constance est intelligente, très belle. C’est une femme forte. J’étais très heureuse que Chiara Mastroianni accepte ce rôle. Elle l’interprète avec une grande finesse. Elle a quelque chose de très contemporain qui va dans le sens du film. Elle a dû forcer sa nature pour jouer cette femme très froide, un peu glacée, car elle n’est pas du tout comme ça dans la vie. Je voulais que Charcot soit au dessus d’Augustine, mais que Constance soit au dessus de Charcot.Il y a deux dîners mondains dans le film qui sont très différents l’un de l’autre…Au premier dîner, on est dans la petite bourgeoisie. Il n’y a que des acteurs autour de la table. Au second, on est chez Charcot, c’est un évènement mondain, un grand dîner. Donc, pour évoquer cette assemblée brillante, j’ai mis un acteur, Grégory Gadebois, qui a eu la gentillesse d’accepter cette petite scène, et je l’ai entouré de vrais intellectuels parisiens, réalisateurs, patrons de presse, journalistes…Le film ouvre sur un crabe pour montrer l’animalité de l’hystérie...J’ai reproduit, sans en avoir conscience, le début et la fin de mon premier court-métrage, qui ouvrait sur un homard vivant et se terminait sur une femme qui s’enfuit… Quand elle regarde bouillir le crabe, Augustine est spectatrice de sa propre animalité. Quand les pattes du crabe se tordent, on peut en effet y voir une ressemblance avec les crises hystériques, les bras qui se tordent.C’est un film marqué par la sensualité ?Je voulais filmer ce regard d’entomologiste sur des femmes qui se débattent comme des papillons pris dans la lumière, l’érotisme cru d’une situation de voyeurisme, sous couvert d’un alibi médical, comme dans les leçons de Charcot où les spectateurs viennent se rincer l’oeil comme dans un peep show. J’ai essayé d’envisager toutes les scènes d’examen entre Charcot et Augustine comme des scènes sexuelles, avec parfois un sous-texte sadomasochiste. Sauf la dernière scène entre eux, de passage à l’acte, qui, paradoxalement, est une scène de rupture. Désormais, Augustine est émancipée et libre de marcher vers son destin… -
Vincent
LindonQu’est-ce qui vous a donné envie d’endosser le rôle du Professeur Charcot ?Moi, c’est toujours l’histoire qui me motive, donc ça commence et ça finit par la lecture du scénario. Quand un scénario démarre très bien, il peut arriver que je m’arrête, que je le mette de côté. Je retarde le moment de découvrir la suite, tellement je suis excité, peut-être la peur d’être déçu, que mon intérêt retombe… Et quand je vois le mot fin et que ça me plaît toujours je me dis : “Ouf ! Je vais le faire.”. Parfois même, quand j’ai très envie de lire un projet, je peux le laisser traîner quelques jours, sur le bureau. Parce que, tant que je ne l’ai pas lu, il est à moi… Dans le cas de “Augustine”, j’ai lu d’une traite et j’ai aussitôt appelé Alice Winocour. Quand elle m’a entendu lui dire :“Voilà, j’ai lu et j’ai préféré vous appeler vite pour vous donner ma réponse.”,elle a cru que j’allais dire non. Quand j’ai dit :“C’est oui.”, elle a fait : “Pardon ? Allo ? C’est vrai ?”. Et j’ai répondu : “Oui, sans restriction. Mais je vous préviens, je ne veux pas voir vos courts. S’ils sont formidables, et que le film l’est moins, je regretterai de ne pas avoir joué dans vos courts. Et s’ils ne sont pas formidables, je serai moins enthousiaste à l’idée de faire le film. Alors je vous dis oui, sans rien voir.” C’est aussi ça qui m’excite dans l’idée de faire un premier film : faire confiance. Généralement, les metteurs en scène mettent énormément dans leur premier film, tellement ils ont attendu pour le faire. On s’est rencontrés quelques jours plus tard, dans un café. J’ai tout de suite aimé ce qu’elle dégageait, son allure singulière, son intelligence. Elle est comme certaines actrices américaines qui sont de plus en plus belles au fur et à mesure du film. En même temps le dialogue qui s’est engagé entre nous était totalement surréaliste, du style : “Quelle heure est-il ?”, “Mercredi”, “Ah merci, c’est là que je descends.” Chacun était intimidé par l’autre, on ne se comprenait pas du tout. Mais soudain, elle a dit quelque chose qui m’a interpellé, je lui ai répondu à mon tour et elle m’a dit : “En fait, depuis une heure et demi, on ne se comprend pas, alors qu’on pense pareil.” C’est devenu un gimmick entre nous, sur le tournage. On se comprenait sans explications. Dès qu’on tentait de se parler, on rendait compliqué des choses limpides. En fait, Alice a cette manière de faire croire à son interlocuteur qu’il a trouvé tout seul une idée formidable, alors qu’en fait c‘est elle qui l’a emmené à trouver cette idée. Moi je suis pareil. Donc on était un peu comme deux mâles dominants. Mais l’essentiel, c’est qu’on avait tout le temps le même goût des mêmes choses. Quand elle ouvrait la bouche, je savais ce qu’elle allait me dire, et réciproquement. On sait tout de suite, dès la première heure d’un tournage, si on va s’entendre ou s’ennuyer avec le metteur en scène. Là, au bout de quarante minutes, je savais qu’Alice était costaud, qu’elle était là, qu’elle savait ce qu’elle voulait, et qu’on allait s’entendre.Le fait que ce soit un premier film ne vous a pas fait hésiter ?Je pars d’un postulat simple, sinon je suis foutu. Quand je prends une décision sur un scénario, j’ai raison. Point barre. Je me fous d’être le seul de monavis, contre le monde entier. C’est moi qui vais tourner, donc c’est moi qui décide et qui sait ce qui est bien pour moi, personne d’autre.Donc, en ce qui me concerne, j’ai décidé que j’avais la science infuse. Les conseilleurs ne sont pas les payeurs. Ça n’empêche pas de se tromper, sinon ça se saurait. Donc en fait je suis comme tout le monde…Comment vous êtes-vous préparé à interpréter le Professeur Charcot ?Ça ne me regarde pas…Vous arrivez sur le plateau en ayant choisi votre façon d’interpréter un rôle ?Oui. Je n’ai pas en moi quarante façons de jouer Charcot. J’en ai une. Mais je suis au service du metteur en scène, comme son co-pilote, comme le plus dévoué des domestiques. Je suis toujours là, increvable. J’ai l’énergie d’un gamin de quinze ans. Je ne quitte jamais le plateau, je ne vais jamais dans ma loge, je ne m’assois jamais, je ne suis jamais fatigué. Premier arrivé, dernier parti.Alice Winocour s’étonnait qu’on vous fasse si souvent interpréter des gens de condition modeste…Ce sont des gens avec qui je suis bien. Cela vient sans doute de mon père, qui était un grand aristocrate, et qui préférait la compagnie des gens simples.J’aime les cafés, les artisans, les gens de la campagne. Les gestes des gens me fascinent. Et puis j’ai le physique pour ça, j’ai un corps de prolétaire. Remarquez, tout ça ce sont des raisons nécessaires,mais pas suffisantes, il doit sûrement se dégager de moi quelque chose de très populaire, qui ne me regarde toujours pas…Dans le couple que Charcot forme avec sa femme, c’est elle qui a le pouvoir ?Charcot vient du peuple, sa femme est une aristocrate, ce genre de couple est toujours assez fascinant. Cette femme d’une très grande famille a mis à disposition de Charcot sa fortune et ses relations. C’est le rat des villes qui se consacre au rat des champs. On peut imaginer l’attraction physique qui a présidé à ce couple. Elle a été séduite et fascinée par lui. C’est elle qui a le pouvoir sur cet homme qui fait trembler son monde à l’extérieur, mais que sa femme impressionne par sa beauté, sa puissance. Elle est intimidante. Et cela peut expliquer l’attraction qu’Augustine exerce sur lui.Soko dit que vous lui avez beaucoup appris…J’ai seulement tenté de lui apprendre comment il ne faut s’accommoder de rien avant une prise, sinon on sera moins bon pendant celle-ci. On peut tricher dans la vie, on le fait sans arrêt.Mais quand on joue, il ne faut pas tricher, jamais. La sincérité prendra toujours le pas sur la technique et sur le savoir-faire. J’ai essayé de lui montrer aussi comment, pour les besoins d’un rôle, il faut savoir rester dans l’inconfort, comment il vaut mieux jouer avec les chaussures mouillées du personnage qu’avec ses bottes de ville, même si la caméra ne les voit pas. En tant qu’actrice, pendant la prise, je n’avais rien à lui apprendre. C’est une comédienne très douée. Elle aussi m’a aidé, sans le savoir, car en lui disant tout ça, c’est aussi à moi que je m’adressais, comme pour ne pas perdre quelque chose qui peut vous filer entre les doigts à tout instant. En tentant de lui montrer le chemin, j’étais vigilant avec moi-même.Vous qui êtes si présent sur un tournage, ce n’est pas trop douloureux après le dernier jour, quand il faut quitter son personnage ?Je passe ma vie à éviter de me poser cette question, alors, de grâce, ne me la posez pas. Lui, c’est moi, le quitter lui, c’est abandonner un petit bout de moi,donc c’est un deuil. Il faut le temps. Mais lui, il m’a aussi donné des choses à moi. L’important, c’est que cela circule entre nous deux. Charcot a enfin un visage, et moi j’ai sauvé des malades…La continuité psychologique d’un personnage, ce n’est pas votre truc ?Pas le mien. Celui du metteur en scène, celui du scénario, celui des spectateurs. Une scène prend racine grâce à celle qui était avant et à celle qui va arriver après. Dans la vie, nous n’avons pas de continuité psychologique, puisqu’on ne sait pas ce qui va arriver dans une seconde. Alors en fait je lis le scénario une fois et après je viens sur le tournage passer mon temps à en faire un petit bout tous les jours, comme si je découvrais, en même temps que Charcot, en tout cas le plus possible. -
Soko
Comment avez-vous entendu parler de ce projet de film ?J’ai un super agent, Grégory Weill, qui m’a parlé du rôle, en me disant : “C’est tellement pour toi ! Mais je te préviens, la réalisatrice et ses productrices ne veulent pas te rencontrer, tu n’es pas du tout ce qu’elles cherchent.”. Il a fini par m’envoyer le scénario, je l’ai lu et là, et là, je suis devenue folle, tellement je savais que ce rôle était pour moi ! J’habite à Los Angeles, et j’étais en train d’enregistrer mon nouvel album, mais j’ai harcelé Gregory en lui disant : “Je viens exprès les voir, je demande juste qu’on me laisse passer des essais,c’est tout !”. Mais elles ne voulaient pas me rencontrer. Toutes les semaines, j’appelais Grégory pour savoir qui elles avaient vues, qui elles allaient voir, et je me disais : “Bon, c’est fichu, ces actrices-là sont tellement loin de ce que je suis que c’est sûr,j’ai zéro chance.”,mais après je me disais :“Elles sont pas encore choisies ces filles-là, donc j’ai quand même ma chance !”.
Ça a duré huit longs mois, et c’était le pire truc du monde. Je n’ai jamais autant voulu un rôle. Alors j’ai harcelé Grégory qui les a harcelé à son tour, jusqu’à ce qu’elle acceptent que je vienne, mais c’était vraiment un genre de faveur qu’elles me faisaient, sans doute pour se débarrasser de notre insistance, tellement on les avait toutes saoulées. Donc, je fais mes essais avec Alice, qui à la fin me dit : “Bon, c’est une version intéressante d’Augustine. Maintenant, on ne sait pas si on veut une fille urbaine, ou sauvage, donc on va réfléchir…”. Je suis repartie et j’ai attendu, sans savoir si ma version allait les convaincre. Au bout de trois semaines, Gregory m’a appelée, et m’a dit : “C’est bon, c’est toi.”. Et je ne l’ai pas cru ! Il a fallu que ce soit Alice qui me le dise pour que j’arrive à y croire. Bien plus tard, j’ai su que, dès que j’avais quitté les essais, elle avait dit à ses productrices : “Ça y est, on l’a trouvée.”.Mais elles ont mis trois semaines à me le dire…Qu’est-ce qui, dans le scénario, avait déclenché cette conviction en vous ?Tout ! L’époque, le challenge du rôle, le sujet, la thérapie. Ça m’intéresse beaucoup, ce rapport au corps, la maladie et le désir d’en sortir, le rapport aux médecins… L’hystérie, c’est fascinant. Le temps que la société a mis pour que ces femmes passent de la classification “sorcière” à celle de “malade”. La place que l’hystérie occupe toujours dans la société, dans des formes contemporaines : l’automutilation,la boulimie, l’anorexie… Moi qui suis féministe, c’est un grand pas vers la libération de la femme que de reconnaître que les hystériques ne sont pas des folles, mais des malades.Comment s’est passé le travail avec Vincent Lindon ?J’étais hyper fière de tourner avec lui. C’est une telle figure dans le cinéma français ! C’était dingue de travailler avec lui. C’est l’acteur le plus investi dans un projet que j’ai jamais vu. Il contrôle tout et en plus ce qu’il apporte au film est énorme ! Aucun acteur ne m’avait jamais donné les conseils que Vincent m’a donné, qui sont des choses simples, mais tellement pleines de sens, et que personne avant lui ne m’avait jamais dites. Par exemple, l’importance d’être exactement en place, et dans ses places, au début d’une scène, parce que si tu n’es pas pile dedans dans les toutes premières secondes, tu ne reviendras jamais dans la scène, des choses comme ça. Et il m’a tellement soutenue ! On ne s’était pas rencontrés avant le tournage, car Alice ne voulait pas qu’il y ait la moindre familiarité entre nous, puisqu’on apprend à se connaître au cours du film. Quand il est venu tourner la toute première fois, j’en étais déjà à mon quatrième jour,j’avais déjà à peu près trouvé mes marques,mais pas lui. On a commencé par la scène dans son bureau, où je lui dis les jours de la semaine. Ça a mis un peu de temps à ce qu’on soit en harmonie tous les deux. J’étais inquiète, et persuadée qu’il me trouvait nulle.A la fin de la journée, Alice vient me dire : “Vincent veut te parler.”. J’étais terrorisée. Il arrive et me dit :“Bon alors, premièrement, (Et là, je me dis : “Ça y est, c’est parti, je vais en prendre plein la gueule.”) premièrement, c’est génial que ce soit toi qui joue ce rôle. Deuxièmement (Là je me dis : “Ah, d’accord, c’est au deuxièmement qu’il va m’assassiner.”) deuxièmement je disais encore hier soir combien tu es une fille incroyable. Troisièmement… Bref, il n’a dit que des choses gentilles, et moi je guettais un :“Mais je dois te dire que tu vas jamais y arriver, c’est une erreur de t’avoir choisie...”, qui n’est jamais venu. Au contraire, ce soir-là, il m’a dit : “Voilà, tu peux compter sur moi, tu peux tout me dire, on fait ce film ensemble, je suis là pour que tu sois incroyable.” Et il a été là, vraiment, complètement généreux et toujours positif.Vous avez beaucoup travaillé avec Alice, en amont du tournage ?On a travaillé quatre mois avant de tourner. On a parlé de tout, du rôle, d’Augustine, de la vision qu’en avait Alice. Moi, je ne voulais pas lire des choses qui m’auraient éloignée du film, je voulais être celle qu’Alice imaginait et rien d’autre. Et puis Augustine est victime de ce qui lui arrive, donc je n’avais pas à être trop renseignée sur ses crises, j’avais à les subir,pas à les comprendre. Donc je me suis concentrée sur les informations qu’Alice me donnait. On a fait tout un travail sur le corps, pour voir comment j’allais garder mon bras plié, mon oeil fermé. On a travaillé avec les effets spéciaux pour voir comment on allait tourner les scènes de crises. Mais je ne me suis vraiment sentie prête qu’en enfilant le corset et les robes. J’ai besoin du costume pour me sentir en place dans un rôle.Qu’est-ce qui semblait le plus dur à réussir ? Les scènes de crise ?Pas du tout, c’est ce qui me faisait le moins peur ! Ce que je redoutais le plus, c’est la scène où Augustine est entièrement nue et Charcot écrit sur son corps. Mais avec Alice, dès qu’une chose nous faisait peur, on en riait, on se mettait à en parler crûment, pour dédramatiser. De toute façon, Alice avait toujours dit qu’elle allait tourner chaque scène comme si c’était une scène sexuelle. Alors, un jour c’était la scène SM, un autre la scène exhibitionniste, la scène où il lui donne la soupe, c’était celle de fellation… La scène dont je garde le meilleur souvenir, c’est celle avec le chimpanzé, parce que quand on tourne avec un animal, on ne peut pas tricher, ni anticiper,on est dans le moment, la spontanéité. On sait ce vers quoi la scène doit aller, le sentiment qui doit s’en dégager,mais on est en roue libre, on joue avec ce qui se passe. C’était magique. Quand aux scènes de crise, c’est celle du début, lors du premier dîner, qui a été la plus éprouvante à faire, parce qu’on l’a tournée sur deux jours. Et le deuxième jour, j’ai passé huit heures au sol, la robe mouillée, les cheveux trempés, au milieu du verre brisé, des crustacés, des algues, et après le sixième seau d’eau que la patronne me jette à la figure, j’ai vraiment craqué. Je me revois, tremblante de froid et de fatigue, enfin plongée dans un bain chaud, avec la propriétaire de la maison où on tournait qui n’arrêtait pas de rentrer dans la salle de bain en disant gentiment :“Ça va ?Vous avez besoin de rien? Une serviette ? Un peu de musique ?”, alors que j’avais juste envie de lui hurler dessus, ou de m’évanouir…Comment Alice vous a-t-elle dirigée ? Elle aime faire beaucoup de prises ?Alice en fait tant qu’elle estime que je ne suis pas dedans. Et ça me convenait parfaitement. Je ne voulais pas qu’elle me ménage. De toute façon, je sais que les gens vont ricaner en entendant ça parce que ça fait cliché de promotion, mais on a vécu une expérience de rêve. On se disait les choses dans une liberté totale, on faisait exactement le même film. Je n’ai jamais imaginé un jour être dans une telle symbiose, avoir une relation aussi parfaite avec un metteur en scène.Vous avez toujours eu envie d’être comédienne?J’ai toujours voulu raconter des histoires. Vers dix-neuf ans, j’avais envie de faire des choses seule. J’ai trouvé l’autonomie qui me convenait dans la musique. Le cinéma m’a rattrapée, parce que des réalisateurs comme Xavier Gianolli ou Virginie Despentes sont venus me chercher. Avec “Augustine”, c’est la première fois de ma vie que je me suis battue pour avoir un rôle. Mais il faut dire que, jouer dans ce film, c’est réaliser un rêve d’enfant. Pour moi, faire des films, c’est interpréter un rôle hyper intense, totalement éloigné de ce que je suis, dans lequel je dois me dépasser chaque jour, vivre dans un challenge permanent, porter des costumes d’époque, avoir des cheveux de princesse, être transformée physiquement au point que plus rien dans ce personnage ne me ressemble…Vous avez quand même quelque chose en vous qui vous a emmenée vers elle…Pour la toute dernière scène du film, je me suis retrouvée sur le pavé de la Salpêtrière, exactement là où elle était et d’où elle est partie. Je me suis jetée à genoux sur le pavé en pleurant, et dans ma tête je lui parlais, je lui disais : “Je veux te rendre grâce, je veux que tu sois fière de moi.”. J’avais envie qu’elle m’aide et je lui ai parlé beaucoup, souvent. Je pense que je ne me séparerai d’elle que le jour où je verrai le film terminé. De même que les acteurs de théâtre ont besoin des applaudissements du public pour quitter leurs rôles et redevenir eux-mêmes, j’ai besoin de voir le film, avec du public, pour me séparer d’Augustine.
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Chiara
MastroianniQui est Constance, la femme de Charcot ?Constance est avant tout une amoureuse. Elle aime Charcot, elle le soutient, on comprend qu’elle l’a aidé et introduit dans des milieux auxquels il n’aurait
pas eu accès sans elle.Au fil du film, elle devine que quelque chose se passe, qui lui échappe, et qui va bien au-delà de l’étude médicale. Mais elle est là, solide, constante dans son amour pour lui. Je trouvais qu’elle portait admirablement son prénom. Je m’étais fait un petit délire sur l’alchimie qui fait que les gens ressemblent à leurs prénoms, jusqu’à ce que j’apprenne qu’en réalité, elle s’appelait Augustine, comme la patiente de Charcot et que c’est Alice, la réalisatrice, qui, à l’écriture, lui avait attribué ce prénom, pour éviter toute confusion entre les deux femmes. Donc, on peut dire que ce prénom définit bien le personnage. C’est une femme qui affronte la tempête et qui, quoi qu’il advienne, reste aux côtés de son mari.Alice Winocour dit que le piège du rôle était d’en faire l’héroïne d’un drame bourgeois…Cela aurait été un risque seulement si on en avait fait une femme désabusée. Mais elle est très solide, très intelligente et elle l’aime profondément. Il n’y a aucune rancoeur en elle. Elle souffre, c’est difficile à vivre, et elle peut être rigide, froide et dure,mais elle ne se ferme pas, elle reste là. C’est ce que j’aime dans le dernier plan qu’on voit d’elle, son regard posé sur lui dans la foule de la Salpêtrière. Il est seul, perdu, elle le regarde. Ce regard rend justice à la force de ce personnage. Elle a compris et elle ne le quitte pas. L’amour qu’elle a pour lui emporte tout le reste.Est-ce que la contrainte du costume vous a aidée à trouver le personnage ?Cela m’a beaucoup appris sur la vie quotidienne de ces femmes qui ne pouvaient absolument pas s’habiller seules, vu la contrainte du corset et le poids des robes, qui se changeaient plusieurs fois par jour, et donc étaient comme des poupées qu’on habille et qu’on déshabille. Ce n’était sans doute pas une existence très palpitante. Moi j’étais enchantée de porter ce genre de costumes, car je n’ai pas eu souvent de rôles dans des films d’époque. Bien sûr, cela vous aide, puisque vous êtes obligée de vous tenir différemment, cela vous apporte une certaine raideur. En même temps, ces femmes ne connaissant pas d’autre façon de se vêtir, il ne faut pas avoir l’air emprunté dans ses gestes. Mais cela m’a permis de comprendre à quel point cette époque contraignait le corps des femmes, quel que soit leur milieu social. On voit dans le film le manque de respect envers les corps des malades de Charcot. Mais on sent également, dans une scène où Constance se déshabille, que les femmes de la haute bourgeoisie ont, sous des tenues très raffinées, le corps serré, corseté, oppressé. C’est un siècle qui emprisonnait
le corps de toutes les femmes.Qu’est-ce qui vous a séduite dans ce projet ?J’ai adoré le scénario, mais je crois que si j’avais rencontré Alice avant de le lire, j’aurais en tout cas accepté tout de suite de travailler avec elle. C’est
une fille très singulière, magnétique et charismatique, qui se cache derrière sa grande frange. Elle est aussi très déterminée, sans aucune agressivité. Elle
est toujours dans le doute mais ce n’est jamais angoissant, car elle sait très bien ce qu’elle ne veut pas,mais aussi ce qu’elle veut. Elle semble très fragile
en apparence, mais elle est bien plus solide qu’on peut le croire en la voyant.
J’ai adoré l’ambiance très douce qu’elle savait créer sur le tournage. L’air de rien, avec son sourire incroyable, elle a une façon très délicate d’être très
déterminée. Elle bascule toujours entre le contrôle et la douceur. Je me suis sentie en confiance. J’ai tout de suite aimé sa vision du film, son désir de faire quelque chose qui tende davantage vers l’onirisme que le réalisme. Moi j’adore ce cinéma-là aussi, je trouvais très séduisante l’idée de traiter cette histoire d’amour à la lisière du fantastique. Il y avait un plan qu’on a tourné dans l’escalier de la maison de Charcot qui me faisait penser à “Hantise”, le film de George Cukor. Au tournage, on sentait, dans ses cadrages, sa volonté de fuir le “téléfilm pédagogique”. Elle a d’ailleurs résisté à l’attrait de filmer le détail d’une robe ou d’une tenture. Elle est restée fixée sur son histoire de désir, de sentiments, elle a veillé à ne jamais rien illustrer ni montrer. Elle n’a pas filmé tout ce décorum qui aurait pu emprisonner le film. Elle m’a encouragée à plonger dans le rôle et dans l’époque, à me sentir comme une héroïne d’EdithWharton. Je l’ai fait d’autant plus volontiers que je savais qu’Alice, elle, avait gardé un pied dans le vingt et unième siècle et qu’elle saurait rendre cette histoire intemporelle et moderne.
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Critiques
- Soko est la lumière du film, et Lindon étincelle. « Augustine » émeut et séduit
Télérama - Une tension érotique électrisée par Soko, animale, explosive, et Lindon, tout d’émotivité rentrée
Le Monde - Porté par deux acteurs époustouflants, un film spectaculaire et hypnotisant.
Le Nouvel Observateur - Un premier film sidérant. Inoubliable.
Grazia - A la fois gothique et moderne. Magistral.
L'Express - Sauvage, sensuelle, exceptionelle Soko
Marianne
- Soko est la lumière du film, et Lindon étincelle. « Augustine » émeut et séduit
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Récompenses
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Festival de Cannes 2012
Semaine de la Critique -
Cérémonie des César 2013
2 nominations
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Festival de Cannes 2012
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Disponible en DVD
- : 97
- Format image : 1.85
- Son : Dolby 5.1
- Langue : Français
- Sous-titres : Français sourds et malentendants
Bonus :
- Courts-métrages de Alice Winocour
- Bande-annonce
Disponible en BLU-RAY- : 101
- Format image : 1.85
- Son : Dolby 5.1
- Langue : Français
- Sous-titres : Français sourds et malentendants
Bonus :
- Courts-métrages de Alice Winocour
- Bande-annonce
Disponible en VODAugustine / VOD
Sortie : le 12-03-2013
- Disponible en téléchargement sur Orange
- Disponible en téléchargement sur Canal Play
- Disponible en téléchargement sur SFR
- Disponible en téléchargement sur UniversCiné
- : 97
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